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Un monde encore peu connu :    les marais de Losthal.

Des terres que même les pluies incessantes de cette nuit-là ne sauraient purifier de leurs moisissures fétides. Au cœur de ces flots mouvants, l’orage résonne et gronde. Mais ce n’est pas ce déchainement des éléments qui saura couvrir les rugissements assourdissants et effrayants qui s’élèvent en cette noire contrée.
Entourée par ces marécages infranchissables, une île vaste et stérile, territoire rocheux, s’étire vers les Terres Sombres de Tryskellia.
Parfois illuminées par les éclairs qui restent agrippés au ciel, les nombreuses failles, signes d’une terre torturée, s’étirent jusqu’aux rives les plus aubeterriennes de l’île, théâtre d’une scène obscure.


L’ordre qui régnait jusqu’alors sur la forteresse-prison n’est plus. Les derniers geôliers ne résistent pas longtemps aux assauts des pires criminels, redoutables guerriers et assassins miraculeusement libérés de leurs cellules par une force inconnue. Dans les escaliers étroits, entrailles torsadées de la plus haute tour, les quelques gardes cèdent rapidement aux violentes attaques. L’ultime et insignifiant rempart humain qui empêchait cette progression de l’ennemi vers le plus gradé des officiers n’est plus. Dans ce chaos, Reste l’écho d’un appel désespéré qui s’élève vers les cieux :

-PROUD ÈAN LASAÏR
MÒR CENNAD EFSTLAND
YLITYS À SPÈÏR
OG LYSIR OKKAR LAND
KERATA À ANDAR
MEÖAL VOLK FJAR…

Le capitaine, posté devant l’unique ouverture de la pièce donnant sur le ciel menaçant, interrompt son incantation. Aucun message ne parviendra au phénix en ce funeste jour. Le bois épais de la porte vient d’être pulvérisé dans un fracas indescriptible.


 

 

 

Il le sait ! ces prisonniers, qu’il aura menés sous une main de fer, n’auront aucune pitié. Les plus abominables tortures l’attendent. Ils sauront le maintenir en vie, le temps qu’il soit le témoin de ses propres entrailles livrées à l’air humide et infect des marais. Puis ils le laisseront agoniser dans d’atroces souffrances, rongé par la voracité des charognards. Sans hésiter, il escalade le rebord de la fenêtre et plonge dans le vide. En contrebas, les rochers aiguisés par l’érosion, fondations naturelles de l’immense fortification, lui promettent une mort immédiate.

Non loin de l’impact brutal et mortel, se dresse la silhouette ténébreuse d’une grande femme vêtue de noir. Instigatrice de cette insurrection, elle admire le spectacle cauchemardesque qui s’anime devant elle. Plusieurs milliers d’arthrions à l’aiguillon caudal, de fourmis et de tissenoires géantes avancent inéluctablement depuis les Terres Sombres, en direction de l’inquiétante magicienne, la plupart se sacrifiant dans la vase capricieuse des marais de Losthal. Bientôt, un immense pont d’insectes et d’arachnides s’étendra entre la plus sinistre des arcontrées tryskelliannes et cette terre d’exil, source d’un nouveau fléau pour la race humaine des Royaumes de l’Alliance.

Cette sorcière saurait s’élever par sa simple magie afin de rejoindre le continent. Il lui serait aussi facile d’user de sortilèges pour ramener les grandes altarines mises en fuite, seules capables de franchir aisément les marécages, mais ce sacrifice animal est nécessaire, spectacle de sa haute puissante. Les anciens prisonniers de la forteresse n’oseront jamais lui désobéir après pareille ostentation.
- …Et en rejoignant ainsi notre armée, qui dominera bientôt Tryskellia, vous scellez désormais les liens qui nous unissent. Voici enfin venu le moment de venger l’outrage fait à notre puissant sorcier. Il renaîtra sur ces terres. Préparons-lui un accueil digne de son rang. Balayons toute résistance pour lui ouvrir le chemin du pouvoir. Créons ensemble la plus impitoyable des armées. Voici ma plus belle œuvre. Elle est pour toi, Volgardh. Que la puissance et la sauvagerie des archors, des Ombrumes et des nouvelles races d’uryfarks s’abattent sur nos ennemis, jusqu’à leur extinction.


Le visage de la magicienne s’est animé d’un sourire machiavélique. Un sourire aux dents acérées et irrégulières. Satisfaite de sa domination totale sur cette faune belliqueuse, résultat d’une terrible et occulte métamorphose, la maîtresse des lieux avance sur ce pont vivant, grouillant des plus hostiles et des plus inquiétantes créatures que l’on puisse imaginer.
Plusieurs centaines de fugitifs l’ont rejointe. Ils avancent, méfiants, attentifs aux moindres réactions agressives de ces monstruosités qui se débattent sous leurs pieds, mais qui leur offrent un passage vers la liberté. L’un d’entre eux, chétif, est bientôt happé par de terribles mandibules gluantes et tranchantes. Un cri à figer le sang des plus téméraires. Une deuxième victime disparaît à son tour dans cet amoncellement d’insectes géants. La dame en noir, sereine, interpelle les survivants :
- Ils n’étaient sans doute pas assez mauvais ou trop fragiles pour mon armée. Il me faut les âmes les plus obscures, les plus avides de pouvoir et de sang, les plus forts aussi pour me seconder.

A cet instant, une nouvelle attaque surgit au cœur même du groupe. L’un des hommes se dresse devant l’abjecte tissenoire. Très vite piégé, il se défend, sectionne trois, quatre puis cinq des longues pattes effilées de la bête. Il termine son travail en plongeant sa lame dans le corps de l’araignée, immédiatement engloutie par ses congénères cannibales, destinée à être digérée.
- Quel est ton nom, Humain ? quémande la sorcière.
- Nerk’Halar ! répond-il simplement.
- Toi, tu me plais !
se réjouit-elle, tendant son index vers le courageux guerrier. Tu seras général de mes troupes. Choisis tes chefs de bataillons.
Elle lance alors dans sa direction une pierre phosphorescente qui illumine les visages apeurés à son passage. L’homme stoppe la trajectoire de l’objet verdâtre d’une poigne ferme.
- Avec ça, tu te rendras maître des uryfarks. Elles t’obéiront désormais. Mène à bien cette guerre pour moi et je te ferai souverain de tout un royaume. Mais ne te fourvoie pas. Ceci n’est qu’un infime pouvoir comparé aux miens. Déçois-moi, trahis-moi et tu seras livré à l’appétit vorace de mes créatures.

Un nouvel âge de désolation s’annonce sur Tryskellia… Oui, je sais ! je l’ai déjà écrit, mais jamais ça n’a été aussi vrai, et puis ça en jette non ?

La quête la plus héroïque de toutes...

Les visions d'Oracle, délivrées par le phénix, hantent depuis déjà de longs mois l'esprit de l'Ambassadrice Ovine lorsqu'une armée monstrueuse déferle sur la cité des Arbres-Donjons. Ombrumes, Géants archors, trolls-cyclopes et Humains de la Lande des Clans se sont unis à d'autres créatures issues de métamorphoses interdites pour anéantir les Halghorns.

Maîtrisant les sortilèges obscurs, la Sorcière Noire Sérusia va conduire ses colonnes meurtrières jusqu'aux remparts de Crystalliande. Des rives du Sini aux collines d'Illvereen, Alexandra et Doryan, jeunes héritiers de ce royaume, vont voir leurs vies bouleversées par ces nouveaux affrontements, écartelés entre courage, douleur et parfois renoncement...

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Pour découvrir le talent d'Adélaïde Camp, illustratrice de la couverture de ce Manuscrit Premier, c'est ici

​Andrujyhr

(nom de plume en mémoire d'une ancienne cité),

ambassadrice des Chroniques Oubliées,
Tryskellia, 16ème d'Iciaé, 5415

Il n'est offert que deux manières de mourir à un rêve :

s'éteindre à tout jamais ou se fondre dans le réel...

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